Notre action

L'action principale de l’Anafé, créée en 1989, consiste à fournir une aide à caractère juridique et humanitaire aux étrangers en difficulté aux frontières françaises et à veiller au respect de leurs droits lorsqu'ils se présentent à nos frontières. Ceux-ci doivent non seulement être traités avec dignité, mais sur la base de règles claires, qui devraient comporter l'accès à des voies de recours effectives. L’Anafé cherche en permanence à dialoguer avec les pouvoirs publics pour faire respecter et progresser ces droits.

Témoignage auprès de l’opinion publique
L’un des objectifs essentiels de l'Anafé est de témoigner auprès de l’opinion publique de la situation aux frontières. Il est atteint au moyen de visites effectuées dans les zones d’attente, dans lesquelles des informations sont recueillies auprès des étrangers qui y sont maintenus. La diffusion de ces témoignages est nécessaire pour que les différents intervenants dans la procédure d'admission sur le territoire soient sensibilisés et informés des difficultés matérielles et juridiques rencontrées par les étrangers aux frontières.

Droit de visite
L’accès des associations dans toutes les zones d’attente est une des principales revendications de l’Anafé depuis sa création en 1989. Cet accès est fondamental car il permet de rencontrer les étrangers maintenus et de témoigner des conditions de leur maintien, de l’évolution des pratiques ainsi que des dysfonctionnements constatés. Ces visites permettent en outre de dialoguer avec les représentants des divers services présents (PAF, OFPRA, Croix-Rouge Française, OFII, service médical).
Une étape a été franchie à la suite de la publication du décret du 2 mai 1995 déterminant les conditions d'accès du délégué du Haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et de certaines associations humanitaires (désormais articles R. 223-1 et suivants du CESEDA). Les associations habilitées à proposer des représentants en vue d'accéder en zone d'attente ont longtemps été au nombre de huit : Amnesty International Section Française, Anafé, Cimade, Forum réfugiés, France Terre d’asile et MRAP et deux associations non membres de l’Anafé, la Croix-Rouge française et Médecins sans frontières.

Ce décret encadrait fortement ces visites : chaque association disposait de dix cartes « visiteurs » mais ne pouvait effectuer au plus que huit visites par an et par zone d'attente. Le décret prévoyait également un maximum de deux personnes par visite, des horaires de visite (entre 8h et 20h) et l’obligation de solliciter une autorisation préalable du ministère de l'Intérieur. Cet accès était également insatisfaisant parce que restreint à un nombre limité d’associations. De nouvelles associations ont à leur tour posé leur candidature (l'Association des personnels de santé réfugiés - APSR, le Groupe accueil et solidarité - GAS, le Gisti, la Ligue des droits de l'homme et Médecins du Monde).

Habilitations et contentieux
Ce n’est qu’en décembre 2005 que le Conseil d’Etat a censuré les refus du ministère de l’Intérieur d’habiliter d’autres associations pour effectuer des visites dans les zones d’attente, considérant que le critère quantitatif n'était pas opposable. Pourtant, il a parfois fallu près de 10 ans de contentieux pour obtenir un agrément.
Anticipant ce nouveau revers contentieux, le gouvernement a modifié le décret du 2 mai 1995 le 30 mai 2005. Ce texte a supprimé la limitation du nombre de visites et a précisé que « tout refus d'habilitation doit être motivé au regard notamment du nombre d'associations déjà habilitées ».

Un arrêté daté du 30 mai 2006 a élargi l’habilitation à treize associations :
- dix membres de l’Anafé : Association d'accueil aux médecins et personnels de santé réfugiés en France (APSR) ; Amnesty International France ; Anafé ; CIMADE ; France Terre d'asile ; Forum réfugiés ; Groupe accueil et solidarité (GAS) ; Groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI) ; Ligue des droits de l'homme ; Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP)
- et trois associations non membres de l’Anafé : Croix-Rouge française ; Médecins sans frontières (MSF) ; Médecins du monde.

Un arrêté du 27 mai 2009 a élargi la liste des associations humanitaires habilitées à proposer des représentants en vue d'accéder en zone d'attente, portant ce nombre à quinze en ajoutant deux associations non membres de l’Anafé : le Collectif Respect et l'Ordre de Malte.
Un nouvel arrêté du 5 juin 2012 réduit à 14 le nombre d'associations habilitées à se rendre en zone d'attente, enlevant le Collectif Respect des associations jusque-là habilitées.

Accès permanent en zone d’attente de l’aéroport de Roissy Charles de Gaulle
Depuis sa création en 1989, l’Anafé demandait à pouvoir accéder aux zones d’attente pour apporter une aide juridique aux étrangers maintenus. La loi Quilès de 1992 n’a que très partiellement répondu à ses revendications ; elle prévoit un droit d’accès réduit pour certaines associations et le HCR. Certaines autorités sont certes également autorisées à visiter la zone d’attente mais utilisent rarement cette possibilité en pratique (parlementaires, juges des libertés et de la détention, procureur de la République).

Cette même période a marqué le début d’une nette dégradation des relations entre l’Anafé et les pouvoirs publics, due notamment au silence – proche parfois du mépris – opposé par les autorités aux signalements par l’Anafé de certains graves dysfonctionnements et à la mise en doute quasi systématique des témoignages des visiteurs ou des propos recueillis par le biais de la permanence téléphonique. Dès que des fonctionnaires étaient mis en cause, les conditions de visites se trouvaient restreintes. Cet état de fait a conduit l’association à organiser des campagnes publiques pour dénoncer les nombreuses illégalités constatées dans la zone d’attente de Roissy Charles de Gaulle (Roissy CDG).

Deux conférences de presse, suivies à l’automne 2001 par un colloque rassemblant plus de deux cent cinquante participants, ont contribué à la reprise d’un dialogue, interrompu depuis plusieurs mois, entre le Ministère de l’intérieur et l’Anafé. Un certain nombre de propositions de l’Anafé ont été discutées au cours de rencontres régulières organisées à partir de la fin 2001 :
- mise en place de réunions trimestrielles – plutôt que d’une réunion annuelle comme le prévoit le décret du 2 mai 1995 – entre les ministères concernés, la police aux frontières (PAF), l’office des migrations internationales (OMI) et les associations habilitées à visiter les zones d’attente ;
- rédaction d’un document d’information traduit dans plusieurs langues pour les personnes maintenues ;
- amélioration des conditions d’accès aux soins médicaux.

A cette occasion, l’Anafé a rappelé l’une de ses principales revendications : l’accès permanent en zone d’attente pour les associations. Le Ministère de l’intérieur a alors accepté une expérience d’un mois de présence dans la zone de Roissy-Charles de Gaulle en mars 2003. Un document-cadre, définissant les conditions de ces interventions quotidiennes au cours de cette période a été élaboré entre le Ministère de l’intérieur et l’Anafé. Il a été décidé que ces visites s’effectueraient hors du quota des huit visites annuelles de chacune des associations habilitées fixées par le décret du 2 mai 1995. Au terme de cette première expérience, l’Anafé a publié un rapport décrivant les nombreux dysfonctionnements de la zone d’attente et démontrant le bien-fondé de sa revendication .

L'Anafé a ensuite repris les négociations avec le Ministre de l'intérieur. Une première convention de six mois permettant un accès permanent de l'Anafé en zone d'attente de Roissy CDG a finalement été signée le 5 mars 2004. Elle permettait à une équipe de quinze personnes d’intervenir à tout moment dans le lieu d’hébergement de la zone (ZAPI 3), et de se rendre deux fois par semaine dans les aérogares, afin de fournir une assistance juridique aux étrangers maintenus. Au cours de l’année 2005, les visites en aérogares ont été élargies à trois fois par semaine.

Cette convention est renouvelée tous les ans. Depuis 2011, les visites en aérogares ont été élargies à quatre fois pas semaine.

Une permanence téléphonique
L'Anafé a mis en place une permanence téléphonique à l’automne 2000, accessible du lundi au vendredi, afin de répondre aux sollicitations des étrangers ou de leurs proches, de fournir une assistance juridique, de les conseiller et éventuellement d'intervenir en leur faveur auprès des autorités. Compte tenu de l'impossibilité de rencontrer librement les étrangers dans les zones, les associations n’étant autorisées à s’y rendre que sous de nombreuses conditions, il a été décidé d’assurer une assistance juridique par téléphone. La permanence téléphonique a été conçue avec un numéro unique, trois associations membres de l’Anafé l’assurant en alternance dans leurs locaux (Amnesty International, Ligue des droits de l’homme et Gisti). Elle est maintenue jusqu’à ce jour alors même que l’Anafé est maintenant présente dans la zone d’attente de Roissy CDG. Elle permet d’offrir une assistance aux personnes qui se trouvent dans d’autres zones d’attente et de seconder la permanence de Roissy.

A l'échelle européenne
Compte tenu du rapprochement des politiques d’asile et d’immigration au niveau de l’Union européenne, notamment pour ce qui concerne la gestion des frontières, l'Anafé s’est intéressée aux systèmes législatifs et aux pratiques des autres Etats membres. Des échanges se sont développés avec des associations européennes. En 2003, l’Anafé a adhéré au réseau de militants et chercheurs Migreurop, qui s’est constitué en association en 2005.

Actualités sur la zone d'attente

Le nombre de personnes déclarées non admises aux frontières françaises est en baisse constante ces dernières années. Selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, le nombre de non admissions sur le territoire français est passé de 18 564 en 2008, à 16 524 en 2009 pour accuser une nouvelle baisse de 33 % en 2010 avec 11 088 personnes non admises. Le nombre de placements en zone d’attente est quant à lui passé de 17 103 en 2008, à 13 180 en 2009, pour atteindre 9 229 en 2010.

Il en est de même des demandes d’admission sur le territoire français au titre de l’asile enregistrées à la frontière; qui connaissent une diminution régulière d'année en année. De 3 285 en 2009, elles ont chuté à 2 624 en 2010, soit une baisse de 20 %. Le taux d’admission au titre de l’asile était extrêmement bas en 2003 (3,8 %) et en 2004 (7,7 %) ; celui-ci est remonté entre 2005 et 2010 (22,2 % en 2005, 20 % en 2006, 61% en 2007, 31% en 2008, 27% en 2009 et 26% en 2010), pour chuter à seulement 10% en 2011.

Cette décroissance est loin d’être anodine : le territoire français (et européen) est de plus en plus difficile d’accès pour les migrants et demandeurs d’asile, et ce car au cours des dernières années les mesures prises pour limiter les arrivées aux frontières se sont nettement multipliées (officiers de liaison immigration dans les pays de départ/transit, délocalisation des contrôles aux mains des transporteurs, visas de transit aéroportuaires, visas retours, critères de la demande d’admission sur le territoire au titre de l’asile "manifestement infondée", etc…).

Cette tendance ne s’est pas démentie en 2011, pourtant traversée par de nombreuses crises internationales. Ainsi, nombre de demandeurs d’asile en provenance de régions en conflit (Côte d’Ivoire, Egypte, Tunisie, Libye, Syrie, Afghanistan, etc…), qui étaient parvenus à atteindre nos frontières pour y demander une protection, n’ont pas été admis sur le territoire, condamnés parfois à être renvoyés directement vers le pays qu’ils avaient fui, certains avant même l’expiration du délai de recours de 48h.

En parallèle, l’entrée en vigueur de la Loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité du 16 juin 2011 constitue un énième durcissement de notre politique migratoire, en affichant la volonté de renforcer les pouvoirs de l’Administration, au détriment des droits des étrangers et des prérogatives du juge judiciaire, gardien des libertés individuelles.