Journée internationale des droits de l’enfant : la France doit mettre fin à l’enfermement des enfants aux frontières

Aujourd’hui encore, la France enferme des enfants aux frontières françaises, que ce soit dans les zones d’attente ou des postes de police aux frontières franco-italienne et franco-espagnole. Ces pratiques, contraires aux engagements internationaux de la France, violent les droits fondamentaux et la dignité des enfants.

Une violation quotidienne de la Convention internationale des droits de l’enfant

Il y a 36 ans, la France ratifiait la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE), s’engageant ainsi à respecter « l’intérêt supérieur de l’enfant ». Pourtant, chaque année, elle enferme des centaines d’enfants aux frontières, qu’ils soient isolés ou accompagnés de leurs familles. Au 1er semestre 2025, la France a enfermé 282 enfants dans les zones d’attente (84 mineurs isolés et 198 mineurs accompagnés)[1].

Ces pratiques ont conduit le Comité des droits de l’enfant des Nations unies à conclure dans un rapport rendu public le 16 octobre 2025, que la France ne respectait pas ses obligations internationales en matière de respect des droits des enfants, qualifiant leur enfermement « d’arbitraire ». 

Des conditions d’enfermement indignes

Les conditions dans lesquelles ces enfants sont enfermés sont alarmantes : espaces exigus, parfois insalubres et sans accès à la lumière naturelle, présence de policiers armés, promiscuité et absence de séparation avec les adultes, nourriture inadaptée, absence ou insuffisance de suivi médical, absence de suivi psychologique, absence d’activités adaptées, etc.

Naël, ressortissant libanais âgé de 2 ans, est arrivé à l’aéroport de Roissy le 10 avril 2025 accompagné de ses parents. Placé en zone d’attente, aucune occupation n’a été mise à sa disposition et la salle de jeux pour les enfants était fermée. Ses parents ont témoigné qu’à cause du bruit de la ventilation et des appels aux haut-parleurs dans les couloirs, Naël ne dormait pas plus de 2 heures d’affilée. Ils ont également témoigné d’un changement de comportement de leur enfant depuis le début de leur privation de liberté : Naël est devenu violent et refusait de s’alimenter. Naël a été enfermé 8 jours dans ces conditions.

Aux frontières terrestres, les conditions d’enfermement à Montgenèvre et à Menton ont été récemment dénoncées par la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté.

Zones d’attente et frontières terrestres : des procédures expéditives et de nombreuses violations des droits

Au-delà des conditions d’enfermement, les procédures telles qu’elles sont appliquées aux enfants enfermés aux frontières ne respectent pas le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).  

Aux frontières terrestres, notamment aux frontières franco-italienne et franco-espagnole, des enfants isolés ou accompagnés sont enfermés dans des locaux de la police aux frontières, sans pouvoir exercer leurs droits : assistance d’un interprète, d’un avocat, accès aux soins, accès à la procédure d’asile… Ils sont ensuite reconduits ou laissés sans protection.

Mustafa, Fanta et leurs enfants de 10 et 12 ans, ressortissants soudanais et éthiopiens ont tenté une première fois la traversée de la frontière dans la nuit du 8 au 9 mars 2025. Ils et elles avaient marché 3 heures. Épuisée, et la neige commençant à tomber, la famille s’est dirigée vers le poste de la police aux frontières de Montgenèvre. La police les a enfermés de 21h à 11h du matin, d’abord au poste de police puis dans la construction modulaire à l’intérieur du poste de la PAF. La jeune Nur, âgée de 10 ans, a été malade dans la nuit (plusieurs épisodes de vomissements) mais aucun médecin n’a été appelé. La PAF leur a dit qu’ils ne pouvaient pas demander l’asile en France s’ils étaient entrés « illégalement » et qu’ils allaient donc être renvoyés en Italie. Aucune information ne leur a été donnée sur la possibilité d’être assistés par un avocat, ni aucune procédure ne leur a été remise. La famille a été reconduite en Italie par la Croix-Rouge italienne venue les chercher au poste de la PAF.

Dans les zones d’attente, les droits des enfants sont également difficiles à exercer voire violés par l’administration : difficulté d’accès aux soins, refus d’accès à la procédure d’asile, absence de désignation d’un administrateur ad hoc, violation du droit au recours, pratique de tests osseux, etc. Ces pratiques traumatiques, violentes et très anxiogènes ont des conséquences durables sur la santé mentale des enfants et impactent profondément leur développement.

En cette journée internationale des droits de l’enfant, 7 enfants sont actuellement enfermés dans la zone d’attente de Roissy.

À quelques mois de la mise en œuvre du Pacte européen sur la migration et l’asile qui va, entre autres, durcir les conditions d’enfermement et permettre la prise d’empreintes des enfants dès 6 ans, l’Anafé rappelle qu’il n’est jamais dans l’intérêt d’un enfant de l’enfermer et appelle à la fin de l’enfermement des enfants aux frontières.

Crédit photo : Olivier Aubert


[1] Source : Ministère de l’intérieur.

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