Mise en danger d’une mineure isolée aux frontières : comment la France piétine les droits de l’enfant au nom du contrôle migratoire
Le 7 juillet 2013, Rose, jeune ivoirienne âgée de 16 ans, tente de rejoindre sa mère, qui vit en France en situation régulière. Séparée d’elle depuis plusieurs années et ne supportant plus l’attente interminable (6 ans) de l’instruction de la procédure de regroupement familial, elle décide de la rejoindre en voyageant sous une autre identité.
A l’aéroport d’Orly, la police aux frontières (PAF) lui refuse l’accès au territoire et la place en zone d’attente en vue de son renvoi vers le Maroc, son pays de provenance. En dépit de documents d’état civil attestant de sa minorité, la PAF choisit de s’en remettre aux résultats – notoirement imprécis – d’un test osseux pour la déclarer majeure, de sorte qu’aucun administrateur ad hoc n’est désigné pour représenter légalement la jeune fille.
Faute de recours suspensif contre la décision de refus d’entrée, Rose peut être refoulée à tout moment vers son pays de transit, où elle n’a aucune attache, et avant même la décision définitive du juge.
Le juge des enfants devait examiner la situation lors d’une audience prévue le 10 juillet 2013. Mais avant qu’il n’ordonne une mesure d’assistance éducative et ne la confie à la garde de sa mère, Rose est renvoyée – ligotée et sanglée – sous escorte policière vers le Maroc, faisant l’objet – selon son témoignage – d’insultes et d’intimidations.
Arrivée à Casablanca, l’escorte française la remet à un agent de transit de la compagnie aérienne Royal Air Maroc (RAM) et repart vers la France. Rose est alors placée dans un « couloir » de la zone de transit de l’aéroport marocain, à même le sol, sans eau et sans nourriture, pendant plus de 30 heures dans l’attente de son refoulement vers la Côte d’Ivoire.
A 00h30, le 12 juillet, elle est renvoyée par la RAM, seule, vers Abidjan, où personne ne l’attend, et où la police ivoirienne exige 200 000 CFA pour la faire sortir de l’aéroport et la remettre à des amis de sa classe. Ainsi, reléguant au second plan l’intérêt supérieur de l’enfant, les autorités françaises ont clairement mis en danger l’intégrité d’une mineure.
L’Anafé demande que soit organisé sans délai le retour de Rose et que soit mis fin au maintien en zone d’attente et au refoulement de tous les mineurs étrangers, conformément aux principes de la Convention internationale des droits de l’enfant, de la Convention européenne des droits de l’Homme, et à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme [1]
[1] CEDH, 19 janvier 2012, Requêtes nos 39472/07 et 39474/07 Popov c/France / CEDH, 12 oct. 2006, aff. 13178/03, Mubilanzila Mayeka et a. c/ Belgique
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