Brève 2016 – Le Passage…
Aujourd’hui, 8 avril, grosse journée en zone d’attente. Les personnes s’enchaînent, la file d’attente derrière la porte de la permanence de l’Anafé grossit de plus en plus, des tensions commencent même à se sentir…
Parmi toutes ces personnes, une jeune fille, étudiante en France en lycée professionnel. Elle s’appelle Charlie Nicole et a 21 ans.
Elle se présente à nous avec tous ses certificats de scolarité ainsi que son contrat jeune majeur avec l’association « Le passage » dans l’Aube. Un nom d’association qui nous fait sourire dans le contexte de la zone d’attente et qui s’applique particulièrement bien à sa situation.
En effet, nous réussirons, en lien avec l’association qui l’accompagne dans ses études, à la faire sortir dans la journée. Première régularisation a posteriori en ce qui nous concerne : la police aux frontières a décidé de revenir sur sa décision initiale de refus d’entrée et de maintien en zone d’attente au motif qu’elle a estimé que Charlie Nicole avait régularisé sa situation peu de temps après son arrivée. Comme quoi, rien n’est impossible.
Il y a donc un sentiment de joie à cette nouvelle, enfin une fin heureuse parmi toutes les autres situations que nous sommes amenés à rencontrer en tant qu’intervenants en ZAPI 3…
Mais aussi sentiment de frustration et d’incompréhension… Comment a-t-il été possible qu’elle, tout comme tant d’autres, se soit retrouvée maintenue en zone d’attente de Roissy ?
Pour sa part, elle aura été « de passage » en ZAPI 3, maintenue pendant 24h, pas plus. Mais un passage qui l’aura marquée. Au cours de ces 24h passées en ZAPI, elle aura connu l’attente : attente dans les couloirs de la ZAPI, attente devant les portes du bureau de la police pour apporter des documents supplémentaires prouvant sa scolarité en France, attente d’une réponse, incertitude,…
Mais au-delà de l’attente, elle s’est sentie comme une criminelle, jugée du fait de ses origines camerounaises, sans respect de ses droits. Elle a l’étrange sensation d’avoir été considérée comme une menteuse alors qu’elle revenait seulement de quelques jours en Espagne avant de reprendre ses cours le lundi suivant.
Une personne de passage en ZAPI 3, un témoignage, trace parmi d’autres de ce passage, mais combien d’autres personnes avec ce même ressenti d’être jugé comme un criminel et un menteur ? Combien d’autres personnes maintenues en zone d’attente alors que cela ne devrait pas être le cas ? Combien de personnes vivant dans cette attente, dans ce lieu de « passage » qu’est la zone d’attente, avec tous les doutes et toutes les incertitudes sur l’issue qui sera donnée à ce « passage » ?
Emilie, Intervenante Anafé, 2016
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