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Trier, enfermer, refouler - Analyse des dispositions applicables aux frontières du Pacte européen sur la migration et l’asile à l’aune de l’expérience française de la zone d’attente

vendredi 25 février 2022

Le 25 février 2022, l’Anafé publie une analyse des dispositions applicables aux frontières du Pacte européen sur la migration et l’asile qui se fonde sur ses 30 ans d’expérience d’accompagnement des personnes enfermées aux frontières et d’observations dans les zones d’attente. Sans surprise, le Pacte prolonge le renforcement des frontières de l’Europe au détriment de la protection des droits.

Fin 2020, la Commission européenne a présenté les grandes lignes d’orientation guidant les étapes d’une refonte de sa politique migratoire, sous la forme d’un nouveau Pacte sur la migration et l’asile.

En renforçant le tri et les contrôles aux frontières, en prévoyant une procédure d’asile à la frontière et en durcissant les pratiques d’enfermement et de refoulement, le Pacte semble être en partie inspiré d’un triptyque déjà existant aux frontières françaises et bien rodé : trier, enfermer, expulser. Il renforce ainsi la « forteresse Europe » en épaississant encore plus ses frontières extérieures.

La zone d’attente (lieu d’enfermement dans les ports, les aéroports et les gares internationales) est souvent présentée comme un système de gestion des frontières, de tri et de refoulement efficace par les autorités françaises. En 2020, 30 794 personnes se sont vues refuser l’entrée sur le territoire aux points de passage frontaliers et 5 064 ont été placées en zone d’attente. Le nombre de renvois immédiats était très important : 25 730 personnes ont été réacheminées immédiatement (dont de potentiels demandeurs d’asile). 892 personnes ont déposé une demande d’admission sur le territoire au titre de l’asile. La durée moyenne de maintien était de 2,5 jours à Roissy et de moins dans les autres zones d’attente. Enfin, à Roissy, le taux de réacheminement était de 63% [1].

Enfermer des personnes aux frontières est créateur de souffrance et de violence. La violation des droits humains est le corollaire de ces politiques. C’est en tout cas le constat de l’Anafé dans les zones d’attente depuis 1992. Le Pacte s’inspirant en grande partie de la pratique française aux frontières va renforcer les atteintes aux droits des personnes et les violences physiques, morales et institutionnelles dont elles sont déjà victimes.

L’analyse de l’Anafé prend le contrepied des discours des décideurs politiques français pour apporter un autre éclairage sur la réalité de l’enfermement aux frontières extérieures de l’espace Schengen.

En s’appuyant sur son expérience de la zone d’attente, l’Anafé s’attache à dénoncer les mécanismes de filtrage et à revenir sur les logiques d’enfermement aux frontières. Elle réalise un focus sur les conséquences de ces procédures pour les personnes particulièrement vulnérables (demandeurs d’asile et mineurs). Enfin, elle critique les garanties insuffisantes en matière de contrôle juridictionnel.

Pour l’Anafé, la seule solution est un changement de politique en matière de migration pour mettre au cœur des préoccupations l’accueil et la protection des personnes étrangères se présentant aux frontières de l’Europe.

Notes

[1Sources : ministère de l’intérieur et Ofpra.