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Brève 2016 - Les dérives de la criminalisation des étrangers aux frontières
ou comment maintenir une personne résidente en France légalement sous couvert de la « lutte contre le terrorisme »
jeudi 13 juillet 2017
Les dérives de la criminalisation des étrangers aux frontières
ou comment maintenir une personne résidente en France légalement sous couvert de la « lutte contre le terrorisme »
Sabri est arrivé le 8 mai à Roissy. Vivant en France depuis de nombreuses années, avec sa femme et ses enfants, il a enfin reçu sa carte de résident au début de l’année 2016. Cette carte tant espérée pendant des années lui a enfin été accordée. Il décide donc de rendre visite à sa famille restée au pays, en Tunisie, pour quelques jours.
Mais le voilà désormais assis en chambre 38, dans le bureau de la permanence de l’Anafé en ZAPI 3.
Lors du contrôle aux aubettes, il s’est vu notifier un refus d’entrée sur le territoire en raison d’un soi-disant « fichage » et de « menace à l’ordre public ». Pire encore, quand les intervenants de l’Anafé essayent d’éclaircir la situation, il leur est répondu qu’aucune information ne peut être donnée au sujet de Sabri, « pour raison de sécurité » (?!). Sa femme, qui l’attend à la porte de la ZAPI pour lui rendre visite, ne pourra pas le voir, la police aux frontières justifiant cela pour cette même « raison de sécurité ».
Sabri est-il terroriste ? Lui-même commence à se demander si ce n’est pas comme cela qu’il est vu par les officiers de la police aux frontières.
Pourtant, il n’a jamais commis d’infractions et n’a même jamais mis les pieds dans un poste de police !
Pendant trois jours, Sabri va vivre en zone d’attente, avec cette étiquette de « terroriste », sans justification autre que celle d’un prétendu « fichier » sur lequel il n’est pas possible d’avoir plus d’informations. Sa femme elle-même commence à se poser des questions, à douter, dans l’incompréhension et le flou total.
Et tout cela, pour, au bout de trois jours, voir la police revenir sur sa décision, le prétendu fichage dont Sabri faisait l’objet n’existant pas en réalité !
Sabri est donc libéré et peut enfin rejoindre sa famille sur le territoire français, territoire sur lequel il réside de manière régulière, rappelons-le.
Mais en attendant, il aura passé trois jours au cours desquels, maintenu en zone d’attente, dans un lieu d’enfermement et de privation de libertés, ses paroles ont été remises en question constamment ; trois jours au cours desquels il aura a été pointé du doigt comme un « terroriste », comme une « menace à l’ordre public » alors qu’il n’a rien à se reprocher (sauf d’avoir rendu visite à sa famille ?) et dans l’incompréhension la plus totale, ne recevant aucune explication.
Une nouvelle fois, la criminalisation des étrangers aura provoqué une situation « absurde » de maintien en zone d’attente d’une personne qui n’avait pas de raisons de s’y trouver. Un aveuglement par les peurs dont souffrent nos sociétés et cristallisées dans la figure de l’étranger avec tous les dégâts que cela peut provoquer.
Emilie, Intervenante Anafé, 2016
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