Témoignage – Daniela, colombienne enfermée 19 jours dans la zone d’attente de Roissy

Publié le 20 Mar 2019

Modifié le 12 Nov 2024



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Daniela, de nationalité colombienne, est restée enfermée dans la zone d’attente de Roissy 19 jours, avant d’être placée en garde à vue pour avoir refusé d’embarquer vers le pays qu’elle cherchait à fuir. L’Anafé a pu la rencontrer en zone d’attente. Elle a témoigné de son expérience.

« J’écris ces quelques lignes pour vous raconter mon expérience au sein de ce lieu d’attente qu’ils appellent « l’hôtel ». Un lieu où tant de personnes sont induises en erreur et traitées de différentes manières. On oblige certaines à signer des papiers contre leur volonté, on dit à d’autres qu’on pourra les aider en zone d’attente, certaines sont discriminées en fonction de leur pays d’origine, d’autres comme moi se voient forcées à dire qu’elles viennent pour travailler ou pour se prostituer…

Ici les personnes sont discriminées dès leur arrivée, beaucoup de personnes arrivent avec le rêve de découvrir et l’envie de continuer leur voyage jusqu’à leur destination finale. Mais malheureusement, elles sont détenues et on brise tous leurs rêves, et même en sachant qu’ils sont en règle avec l’administration, ils se retrouvent ici.

A mon arrivée, on m’a donné l’opportunité de m’organiser, ma réservation d’hôtel avait été annulée à cause du retard de mon vol. On m’a donné 24h pour régulariser ma situation, ce que j’ai immédiatement fait en payant une nouvelle réservation. En zone d’attente, on vous fait perdre votre temps, votre argent et surtout vos rêves, chaque personne qui arrive ici s’en va frustrée, à cause des mauvais traitements, du rejet et surtout de la discrimination.

Quand je suis arrivée ici, on m’a enlevé toutes mes affaires. Le jour suivant, ayant très mal au niveau du bas ventre, j’ai demandé à faire un test de grossesse, ils ont refusé. Tout ce qu’on vous prescrit ici sont des médicaments génériques, on ne vous demande même pas si vous êtes allergique. On m’a donné un médicament pour le mal de tête, je n’arrivais pas à aller aux toilettes, j’avais peur.

En rentrant me reposer dans ma chambre, j’ai commencé environ une heure après à ressentir une douleur très forte et à saigner de manière anormale. J’ai tenu deux jours, sans recevoir de soins ni avoir accès à ma valise. Quand finalement on m’a emmenée à l’hôpital, j’étais escortée par 4 policiers qui me surveillaient comme si j’étais une délinquante. On m’a laissé là de 20h à 23h40, en position assise alors que je demandais à pouvoir m’allonger, encore une fois on ne me l’a pas permis. Ils m’ont dit que ce n’était pas leur problème. On m’a fait plusieurs tests et une échographie et pendant tout ce temps, je n’avais pas d’interprète pour m’expliquer la situation. On m’a seulement donné un médicament et de retour en zone d’attente, quand j’ai demandé à avoir une copie des papiers de l’hôpital, on me l’a refusé. Cela faisait 3, presque 4 mois que je n’avais pas mes règles et on m’a dit que ces saignements étaient juste des règles normales.

Ils m’empêchent de continuer mon voyage seulement parce qu’ils peuvent, il n’y a pas de vraies raisons pour lesquelles je ne pourrais pas rentrer, je n’ai pas besoin de visa pour aller en Espagne qui était ma destination d’origine. Quand je suis arrivée, le juge insinuait que je voulais venir à Paris alors que c’est faux. Il faut faire attention ici, il y a des associations comme la Croix rouge ou l’Anafé qui vous aident mais il y a aussi des institutions comme la police qui maltraitent tout le monde. »

Daniela, colombienne enfermée 19 jours dans la zone d’attente de Roissy

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