Brève 2016 – Mineurs isolés en zone d’attente : droits en péril aux frontières françaises

Publié le 02 Mai 2017

Modifié le 20 Nov 2024



EnfantsTémoignages

Le 2 décembre 2015, l’Anafé était avertie de la situation de Joy, jeune mineure isolée de nationalité nigériane, maintenue en zone d’attente à Roissy depuis le 28 novembre où elle a déposé une demande d’asile. Sa situation témoigne, une fois de plus, d’une série de violations des droits de personnes plus vulnérables en zone d’attente, notamment des mineurs, que l’Anafé ne cesse de dénoncer.

Bien que le maintien en zone d’attente des mineurs isolés demandeurs d’asile soit, depuis l’entrée en vigueur de la réforme du droit d’asile le 2 novembre 2015, une exception, Joy s’est vue refuser l’accès au territoire français et notifier un maintien en zone d’attente.

Pourtant, un document délivré par le CICR (Comité international de la Croix-Rouge) en 2013 attestait bien de sa minorité, indiquant une date de naissance qui lui donnait 17 ans au moment de son arrivée aux frontières françaises. Mais, il semble que cela ne soit pas suffisant aux yeux de l’administration… Un test osseux a donc tout de même été pratiqué, ayant abouti à la confirmation de l’âge de Joy, établi à 17 ans. Un petit rappel de la Convention internationale des droits de l’enfant semble s’imposer ici : l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale dans toutes les prises de décision le concernant (voir en ce sens l’article 3 de la Convention). Il ne peut être en aucun cas de l’intérêt d’une jeune fille de 17 ans d’être maintenue en zone d’attente et de voir ses interlocuteurs remettre en cause son âge alors même qu’elle se trouve en situation de vulnérabilité et qu’elle demande une protection internationale. De telles pratiques sont inacceptables et intolérables. Rappelons les conclusions du Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, M. Gil Robles, qui, dans son rapport de 2006 [1] , dénonçait déjà ces suspicions généralisées à l’égard des mineurs isolés étrangers en rappelant que les examens osseux étaient des techniques « inadaptées ».

Mais les violations des droits de Joy ne s’arrêtent pas là. Les investigations autour de la minorité de Joy ont également conduit à s’intéresser aux visas déjà édités au nom de Joy. Des documents soulevèrent alors, à nouveau, des doutes sur sa minorité. Désormais considérée comme majeure, c’est seule que Joy a dû se présenter au juge des libertés et de la détention (JLD), son administrateur ad hoc ayant été dessaisi. Suite à l’audience, le JLD a pourtant décidé de prolonger son maintien en zone d’attente. Dans le même temps, sa demande d’asile a été rejetée. Un recours a été effectué avec l’aide d’un avocat pour contester cette décision mais le tribunal administratif l’a rejeté.

Dans l’impasse, Joy a dû attendre, toujours privée de liberté, son refoulement vers le Nigéria, à Lagos, qui a eu lieu le 13 décembre, soit après 16 jours passés en zone d’attente.

Nouvelle victime des violations des droits de l’Homme aux frontières française, la situation de Joy témoigne une fois de plus des conséquences de la suspicion généralisée à l’égard des mineurs.

Emilie, Intervenante Anafé, 2016

[1ROBLES Gil, Rapport sur le respect effectif des droits de l’homme en France, Conseil de l’Europe, 15 février 2006.

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