Brève 2010 – Un Sénégalais à Paris
Souleyman, est Sénégalais. Il est arrivé à l’aéroport d’Orly le 14 Février 2010 en provenance de Casablanca. Venu en France pour faire du tourisme mais surtout dans le cadre d’un jumelage d’écoles entre le Sénégal et deux villes du Pas-de-Calais, il devait rester jusqu’au 26 février 2010. Il est alors placé en zone d’attente par la police aux frontières (PAF), pour défaut d’attestation d’accueil, d’argent liquide suffisant (100 euros), et parce que son visa revêtait la mention « professionnel » alors qu’il venait en partie pour du tourisme. Jusque-là, rien de bien méchant et ne pouvant se régulariser rapidement. Une amie et collègue, qui travaille pour le service culturel de la ville où il devait se rendre, Laurence, a alors entrepris des démarches pour essayer de le faire admettre sur le territoire français. Lors de son interpellation, la PAF a assuré à Souleyman qu’il lui serait possible de régulariser sa situation en apportant les copies des documents manquants.
Laurence a donc fait toutes les démarches nécessaires pour finalement s’entendre dire par la même administration que les fax n’étaient pas suffisants. Désormais, il fallait les originaux. Souhaitant régulariser sa situation au plus vite, Souleyman a donc décidé de repartir de son plein gré afin de revenir avec les originaux des documents, respectant ainsi la volonté de la PAF. L’histoire aurait donc pu en rester là. Cependant, le 16 Février 2010, soit 2 jours après son arrivée en France, Souleyman a été réembarqué de force vers le Sénégal.
Le refoulement s’est passé dans des conditions plus que désastreuses. Les papiers de Souleyman ne lui ont pas été restitués (il devra aller les chercher auprès des autorités sénégalaises). La PAF a gardé son passeport et y a apposé le tampon « refoulé » alors qu’elle avait affirmé, la veille, que ce ne serait pas le cas. Et Souleyman est reparti vers Dakar sous escorte policière. Ce refoulement reste un véritable mystère, car Souleyman n’a jamais caché sa volonté de repartir dans son pays afin de régulariser sa situation et donc ne s’est pas opposé à la décision de renvoi prise par la PAF, ce traitement étant celui infligé aux étrangers qui opposent un refus catégorique de quitter le territoire français.
Il existe cependant une explication officieuse à ce comportement. Les élus de la ville où devait se rendre Souleyman, indignés de la situation, ont envoyé des mails de soutien à la PAF toute la journée du 15 Février. Laurence, quant à elle, téléphonait régulièrement pour connaître les avancées de la situation de Souleyman. La PAF, agacée, a fini par lui fait comprendre qu’elle commençait à déranger… Elle a donc arrêté d’insister par peur des conséquences que cela pourrait avoir pour Souleyman. Ce soutien et cette insistance ont malheureusement joué en défaveur de Souleyman. La PAF irritée par tant de contestation a souhaité montrer qu’en zone d’attente c’est bien elle qui a le pouvoir. Elle a donc donné des informations contradictoires à Laurence pour finalement ne pas accepter les documents fournis et refouler Souleyman en lui empêchant, en pratique, avec ce tampon « refoulé », d’entrer sur le territoire français pendant de nombreuses années.
En effet, il lui sera désormais beaucoup plus difficile d’obtenir un visa pour entrer sur le territoire Schengen.
Cet exemple n’est qu’un exemple parmi tant d’autres. L’administration française possède un pouvoir absolu en zone d’attente et ne s’en cache pas. Le but de la zone d’attente et de la PAF est bel et bien de montrer aux étrangers qu’ils ne sont pas forcément les bienvenus en France. Aucune différence n’est faite entre celui qui vient pour du tourisme, celui qui vient demander l’asile ou qui est supposément entré frauduleusement sur le territoire.
A l’heure actuelle nous sommes bel et bien face à une criminalisation de l’étranger. Un étranger n’est qu’un étranger. Il reste, dans la tête des autorités françaises, cet « Autre », potentiellement effrayant, ayant des intentions supposément malhonnêtes. Il est malheureusement bien loin le temps où la devise apposée sur les frontons de nos mairies signifiait encore quelque chose.
Clarisse, Intervenante Anafé, 2010
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