Brève 2016 – Des vacances inoubliables en ZAPI 3
Silvia (prénom d’emprunt) n’est pas près d’oublier son premier séjour en Europe. Ressortissante péruvienne, elle souhaite se rendre en Italie pour rejoindre sa sœur, à l’occasion de l’anniversaire de cette dernière. Les billets sont chers, et les vols directs entre Lima et l’Italie, plutôt rares. Elle a choisi une option plus économique, avec une escale à Paris. Funeste erreur !
En effet, une fois débarquée de son vol en provenance du Pérou, Silvia fait l’objet d’un contrôle par la police aux frontières (PAF). Les agents constatent alors que la lettre d’invitation remplie par sa sœur n’est pas revêtue d’une apostille, une formalité administrative qui confère une valeur légale à un acte émanant d’un pays étranger. En outre, ils remarquent également que Silvia est démunie du viatique nécessaire : une somme d’argent à présenter qui doit couvrir les frais du séjour et qui est calculée en fonction de la durée de ce dernier. Peu importe que Silvia précise que dans la lettre d’invitation sa sœur s’engage à prendre en charge l’ensemble des frais de Silvia. La police n’a cure de ses explications.
Les agents de la PAF décident alors d’empêcher Silvia de poursuivre son voyage et de se rendre en Italie. En conséquence, elle est placée en zone d’attente, privée de liberté, en attendant que l’administration organise son renvoi vers le Pérou.
Pas encore totalement désemparée, Silvia parvient à contacter très rapidement sa sœur et lui fait part de son problème. Aussitôt, celle-ci régularise la lettre d’invitation et la transmet à la police aux frontières : il manquait l’apostille, et bien la voilà. Le viatique était insuffisant ? Silvia reçoit une somme d’argent conséquente par mandats. Naïve, Silvia pense pouvoir sortir rapidement : elle présente à la police sa lettre et ses mandats. Plus aucune raison de ne pas la laisser poursuivre son voyage !
Contre toute attente, elle essuie un refus. Enfin, plus exactement, elle comprend que la police refuse de revenir sur sa décision initiale quand, après avoir attendu vainement une réponse, elle passe une nouvelle nuit enfermée en zone d’attente.
Au bout de quatre jours, elle est présentée au juge des libertés et de la détention. « Enfin, se dit-elle, on va pouvoir examiner mes documents, le malentendu va se dissiper et je pourrai sortir… ». C’était sans compter un juge facétieux qui va jusqu’à refuser d’examiner lesdits documents en lui expliquant doctement qu’elle doit se retourner vers le juge administratif.
C’est ce qu’elle finira par faire. Elle saisit le juge administratif d’un référé-liberté et lui demande de mettre fin à son enfermement : dès lors qu’elle a présenté tous les documents qu’on lui reprochait de ne pas avoir sur elle, pourquoi la maintenir enfermée en France et ne pas la laisser aller en Italie, rejoindre sa sœur ?
Heureusement pour elle, elle trouvera enfin une oreille attentive auprès du juge des référés. Après neuf jours passés enfermée en zone d’attente, elle sera finalement libérée, le juge ayant reconnu que la persistance de la PAF constituait une violation grave et manifeste d’une liberté fondamentale.
A la sortie de la ZAPI, elle retrouve sa sœur qui est venue exprès d’Italie afin d’apporter encore d’autres documents, si besoin en était, et assister à l’audience au Tribunal administratif. Finalement réunies, elles pourront, toutes les deux, rejoindre Milan.
Vincent, Intervenant Anafé, 2016
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