Brève 2011 – Les comptes d’apothicaire de la police aux frontières
Le placement en zone d’attente (ZA) est une mesure de privation de liberté qui ne peut durer, sauf exception, plus de vingt jours. Il s’agit là de l’hypothèse où une personne, qui s’est vue refuser l’entrée sur le territoire français, est présentée une première fois au bout de 96h (quatre jours) au juge des libertés et de la détention qui prononce la prolongation du maintien en ZA pour huit jours, puis une seconde fois devant ce même juge qui prolonge à nouveau le maintien pour huit jours.
Donc cela paraît simple, 4 + 8 + 8 = 20. Et la PAF semble s’en tenir au seul résultat de cette équation : les maintenus doivent être libérés au bout de 20 jours. Sauf que ce n’est pas si simple, et quatre ressortissants angolais en ont fait l’amère expérience…
Le 31 décembre 2010 au matin, un groupe d’angolais demandeurs d’asile arrive à Roissy et est placé en zone d’attente. Ils sont présentés une première fois au juge des libertés et de la détention le 3 janvier soit trois jours après leur arrivée. Ce juge ordonne la prolongation de leur maintien pour huit jours supplémentaires ce qui nous amène au 11 janvier, date à laquelle une nouvelle prolongation de huit jours est prononcée. La mesure d’enfermement aurait donc du se terminer le 19 janvier au matin, après dix neuf jours vu que les personnes ont été présentées à un juge non pas quatre mais trois jours après leur arrivée, se qui s’est répercuté sur la prolongation suivante.
Reprenons donc :
31 décembre (jour 1) + 3 jours = 3 janvier
3 janvier (jour 3) + 8 jours = 11 janvier
11 janvier (jour 11) + 8 jours = 19 janvier
Or ce 19 janvier en début d’après-midi quatre personnes de ce groupe d’angolais (les autres ont déjà été refoulés) passent à la permanence de l’Anafé. Elles sont très inquiètes car d’une part elles auraient dû être libérées le matin et d’autre part la police aux frontières (PAF) leur annonce qu’un renvoi est prévu vers 20h.
Nous appelons donc la PAF pour leur « signaler » que ces personnes ne devraient plus être en ZAPI et que dès lors il est inconcevable de tenter de les refouler. S’ensuit un dialogue de sourds. L’officier nous répète que la zone d’attente c’est vingt jours et que cela n’a pas d’importance particulière si la première présentation au juge des libertés et de la détention s’est faite avec un jour d’avance (la police a même fait preuve de « diligence »…).
De notre côté nous tentons désespérément de faire comprendre que le délai de vingt jours est un délai butoir et que ce qui compte c’est la dernière ordonnance prolongeant le maintien pour huit jours à compter du onzième jour. Mais apparemment pour la PAF, les ordonnances du juge de la liberté et de la détention ne sont que de simples formalités sans grande importance car de toute manière c’est vingt jours. La discussion se clôt par un lapidaire « de toute façon s’ils ne sont pas contents ils n’ont qu’à faire un recours devant le Tribunal administratif de Montreuil » (recours qui ne leur servirait pas à grand chose vu qu’il n’est pas suspensif).
Malgré notre tentative d’intervention, ces quatre angolais ont été présentés sur un vol à destination de Luanda le soir du 19 janvier et placés en garde à vue suite à leur refus d’embarquer. Nous restons depuis sans nouvelles de ce groupe.
J’avais pourtant cru comprendre qu’une privation de liberté exécutée en dehors des procédures prévues par la loi s’appelle une détention arbitraire…
Yanne, Intervenante Anafé, 2011
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