Pendant ce temps…. Une française de 11 ans privée de liberté en zone d’attente de Roissy
Dans la zone d’attente de l’aéroport de Roissy, une jeune fille française de 11 ans a été privée de liberté pendant quatre jours, la police aux frontières lui refusant l’entrée sur le territoire.
Lucie a 11 ans. Elle a la nationalité française et est arrivée le 15 octobre dernier, accompagnée de sa mère qui dispose, elle, d’un titre de séjour « vie privée et familiale » délivré par la préfecture de Mayotte. La particularité de ce type de titre est qu’il n’autorise pas son titulaire à se rendre en métropole, en raison du régime dérogatoire applicable à Mayotte [1]. La France une et indivisible est en effet une fiction et de nombreuses règles s’appliquent différemment selon que l’on habite Paris, Cayenne, Basse Terre ou Mamoudzou.
Arrivées à Roissy, Lucie et sa mère ont fait l’objet d’un contrôle par les agents de la police aux frontières (PAF) et ceux-ci ont décidé de refuser l’entrée non seulement à la mère, mais également à la fille !
Ce faisant, les fonctionnaires ont tout bonnement considéré que des dispositions applicables aux étrangers l’étaient à Lucie, pourtant ressortissante française. Au mépris du droit, l’administration a interdit à une ressortissante française l’entrée sur le territoire de son propre pays et l’a enfermée en zone d’attente, lieu privatif de liberté destiné à des étrangers.
Pour ne pas séparer mère et fille, le bon sens imposait pourtant que la PAF leur permettent toutes deux d’entrer en Métropole, plutôt que de violer les droits d’une enfant au nom de la spécificité mahoraise.
Qui plus est, durant ses quatre jours d’enfermement, Lucie a fait l’objet de plusieurs tentatives d’embarquements (les 17 et 18 octobre notamment) à destination de Dubaï.
Bien que mineure et française, ce n’est qu’au bout de 96 heures qu’elle a pu finalement retrouver la liberté, le juge de la liberté et de la détention ayant refusé de prolonger son enfermement.
Incompétence ou politique du chiffre ? Les raisons de ces aberrations resteront inconnues.
L’exemple de Lucie confirme ce que l’Anafé constate régulièrement en zone d’attente. Tous les jours, des mineurs, accompagnés de leurs parents ou isolés, continuent à être enfermés dans un lieu anxiogène et inadapté et ce, en violation des normes internationales que la France s’est engagée à respecter. Elle continue ainsi à violer les principes de droit international, de la jurisprudence européenne, du droit interne et des recommandations des instances de protection des droits humains. Le 12 juillet 2016, la Cour européenne des droits de l’homme a d’ailleurs rendu une série de décisions condamnant la France pour avoir privé de liberté des jeunes enfants étrangers [2].
L’Anafé entend une nouvelle fois rappeler son opposition et les dangers liés à l’enfermement des mineurs, accompagnés ou non, dans les zones d’attente où contrairement à ce qu’affirme l’administration, la sécurité des mineurs n’est pas garantie et où les droits fondamentaux des personnes maintenues sont souvent bafoués.
[1] Voir en ce sens l’article L 832-2, alinéa 1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile introduit par l’ordonnance n° 2014-464 du 7 mai 2014 – art. 20.
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