L’étranger et le juge au royaume de la police
Commentaire de la loi Sarkozy
Dispositions relatives à la modification des articles 5
et 35 quater de l’ordonnance du 2 novembre 1945 (loi n°2003-1119
du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l’immigration,
au séjour des étrangers en France et à la nationalité,
JORF 27 novembre 2003, p. 20136)
L’on constate à la lecture des nouvelles dispositions
relatives aux articles 5 et 35 quater de l’ordonnance du 2 novembre
1945 par la loi du 26 novembre 2003 une volonté manifeste de
renforcer les pouvoirs de la police aux frontières au détriment
de l’intervention du juge judiciaire et des garanties offertes
aux étrangers maintenus en zone d’attente. Certaines
dispositions, notamment celles concernant la définition de
la zone d’attente et la délocalisation des audiences
dites du 35 quater, permettent en outre de légaliser des situations
discutées et dénoncées, parfois depuis de nombreuses
années, par l’Anafé. Certains aspects de la réforme
vont jusqu’à contredire la jurisprudence établie
par la Cour de cassation. Ils avaient pourtant été,
pour la plupart d’entre eux, critiqués par la Commission
nationale consultative des droits de l’homme, dans son avis
adopté le 15 mai 2003.
Enfin,
il est regrettable qu’un recours suspensif contre la notification
de non admission sur le territoire n’ait toujours pas été
instauré alors que des étrangers demandant leur admission
au titre de l’asile risquent d’être refoulés
après un examen sommaire de leur demande d’asile.
Notion
du jour franc
La
loi modifie l’article 5 de l’ordonnance du 2 novembre
1945 qui prévoyait “ qu’en aucun cas le refus d’entrée
ne peut donner lieu à une mesure de rapatriement contre le
gré de l’intéressé avant l’expiration
du délai d’un jour franc ”, en précisant
dans un nouvel alinéa que l’étranger “ est
invité à indiquer sur la notification s’il souhaite
bénéficier du jour franc ”. Selon le projet initial,
il était seulement “ réputé y renoncer
lorsqu’il refuse de signer le procès verbal ”.
Afin d’éviter d’être en contradiction avec
le principe selon lequel il peut être renoncé à
un droit seulement expressément, sauf en cas de forclusion,
le législateur a préféré inverser la procédure
: le silence ne profitera plus à l’étranger, il
lui faudra exprimer clairement sa volonté d’être
rapatrié après l’expiration d’un jour franc,
faute de quoi il ne pourra pas disposer de ce délai supplémentaire
avant son embarquement forcé. On assiste ainsi à une
importante fragilisation de ce qui devait pourtant être l’une
des garanties essentielles de l’étranger se présentant
à nos frontières. La possibilité de prendre contact
avec son consulat, un membre de la famille ou un proche avant d’être
rapatrié est en effet essentielle. L’on peut craindre
que dans un contexte dans lequel l’étranger est souvent
exposé à des pressions de la part de la police aux frontières
et où les problèmes d’interprétariat sont
souvent nombreux, il ne soit pas correctement informé de la
possibilité de bénéficier d’un tel droit
et qu’il soit simplement invité à signer un refus
d’admission, souvent à l’issue d’un contrôle
effectué en passerelle d’avion.
Définition
de la zone d’attente
L’article
50 de la loi complète l’article 35 quater, I, et prévoit
que les étrangers pourront être maintenus non seulement
dans l’emprise directe aéroportuaire, portuaire ou ferroviaire
mais également “ à proximité du lieu de
débarquement ”. Cette disposition vise clairement des
situations telles que celle déjà rencontrée après
l’échouage du navire East Sea sur la côte varoise
en février 2001. Une zone d’attente ad hoc avait spécialement
été créée dans l’urgence, ce qui
avait conduit certaines associations de défense du droit des
étrangers à saisir le tribunal administratif de Nice,
qui critiquaient le maintien d’étrangers dans une zone
d’attente qui n’existait juridiquement pas encore lors
de leur placement initial. Le tribunal administratif de Nice n’a
pas encore statué. En tout état de cause, sa position
ne sera pas de nature à infléchir les nouvelles dispositions
qui forme désormais notre cadre législatif.
L’article
50 de la loi ajoute un nouvel alinéa à l’article
35 quater, VIII, et prévoit également que “ l’étranger
peut être transféré dans une zone d’attente
dans laquelle les conditions requises pour son maintien dans les conditions
prévues au présent article sont réunies ”.
Il ajoute enfin que la zone d’attente “ s’étend,
sans qu’il soit besoin de prendre une disposition particulière,
aux lieux dans lesquels l’étranger doit se rendre soit
dans le cadre de la procédure en cours, soit en cas de nécessité
médicale ” (article 35 quater, I, al. 6). La loi valide
ainsi la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass. Civ. 2ème,
18 mars 1998).
Ces
dispositions sont clairement destinées à favoriser la
souplesse et la commodité de la gestion de la zone d’attente
par la police aux frontières. Elles se rapprochent de plus
en plus de la définition de la rétention administrative
de laquelle il découle que c’est la zone d’attente
qui suit l’étranger et non pas l’inverse. Dans
ces conditions, les garanties de l’étranger maintenu
en zone d’attente risquent d’être considérablement
affaiblies. L’on peut en effet douter du respect des droits
fondamentaux qui risquent de devenir trop formels, ne serait-ce qu’à
propos de la mise à disposition effective des moyens matériels
qui sont nécessaires pour leur mise en œuvre.
Autorités
habilitées à signer les mesures de maintien en zone
d’attente
La
législation antérieure prévoyait que seul le
chef du service de contrôle des frontières ou le fonctionnaire
désigné par lui, titulaire au moins du grade d’inspecteur
était habilité à prononcer le maintien en zone
d’attente. La loi du 26 novembre 2003 a élargi cette
disposition à tout fonctionnaire “ titulaire au moins
du grade de brigadier ”. Lorsque ce sont les douanes qui procèdent
à une telle notification, cela peut être un agent de
constatation principal de deuxième classe (article 35 quater,
II, al. 1er). Cette disposition, clairement destinée à
répondre aux commodités de la police aux frontières,
pose néanmoins un certain nombre de difficultés. Ainsi,
il est surprenant qu’un acte de restriction de la liberté
d’aller et venir puisse être réalisé par
un fonctionnaire n’ayant pas le statut d’officier de police
judiciaire.
Garanties
de l’étranger maintenu en zone d’attente
La
loi du 26 novembre 2003 retient quelques avancées jurisprudentielles
de ces dernières années, notamment en matière
d’exercice effectif des droits de la défense, encore
que ces garanties risquent en pratique d’être difficilement
respectées. Le gouvernement et le législateur n’ont
par ailleurs pas hésité à affaiblir en de nombreux
aspects les droits fondamentaux de l’étranger maintenu
en zone d’attente qui avaient pourtant été soulignés
par le juge judiciaire, intervenant en tant que garant, selon la Constitution,
des libertés individuelles.
Notification
des droits
L’étranger
n’est plus “ immédiatement informé de ses
droits et de ses devoirs, s’il y a lieu par l’intermédiaire
d’un interprète ”. Il est simplement “ informé,
dans les meilleurs délais, qu’il peut demander l’assistance
d’un interprète et d’un médecin, communiquer
avec un conseil ou toute personne de son choix et quitter à
tout moment la zone d’attente pour toute destination située
hors de France. Ces informations lui sont communiquées dans
une langue qu’il comprend ” (article 35 quater, I, al.
2).
Cette
nouvelle formulation permettra au juge judiciaire d’apprécier
avec plus de souplesse qu’auparavant le délai courant
entre l’interpellation de l’étranger, à
partir de laquelle la restriction de liberté devient effective,
et la notification de la mesure de maintien en zone d’attente
et des droits qui y sont rattachés. Les difficultés
pratiques souvent invoquées par la police aux frontières
risque de justifier de nombreux retards dans la notification des droits
des étrangers qui font l’objet d’un placement en
zone d’attente.
Affaiblissement
du rôle du Parquet
La
loi avalise également la jurisprudence de la Cour de cassation
selon laquelle la seule mention de l’avis à Parquet sur
la décision de maintien ou de son renouvellement est considérée
comme suffisante et dispense de ce fait la police aux frontières
de produire l’avis au dossier : “ Lorsque la notification
faite à l’étranger mentionne que le procureur
de la République a été informé sans délai
de la décision de maintien en zone d’attente ou de son
renouvellement, cette mention fait foi sauf preuve contraire ”
(article 35 quater, II, in fine). La bonne foi de la police aux frontières
est présumée et la possibilité pour l’étranger
d’apporter la preuve contraire risque cependant de rester théorique.
Le rôle du procureur de la République en tant que garant
des libertés individuelles est également affaibli par
le nombre de ses visites qui diminue. Si l’obligation était
auparavant semestrielle, elle est désormais seulement annuelle
et “ chaque fois qu’il l’estime nécessaire
” (article 35 quater, V, al. 1er).
L’intervention
d’un interprète
Les
droits relatifs au concours d’un interprète sont également
fragilisés. Ainsi que cela a été précédemment
énoncé, la notification des droits se fait dans une
langue que l’étranger “ comprend ” et non
pas dans sa langue maternelle. Il est pourtant regrettable que le
législateur français n’ait pas estimé nécessaire
que la notification de mesures aussi complexes et déterminantes
pour l’avenir de tout étranger présent à
nos frontières soit faite dans la langue dont chacun est le
plus familier. La loi prévoit même que “ si l’étranger
refuse d’indiquer une langue qu’il comprend, la langue
utilisée est le français ”. Il risque ainsi d’être
pénalisé dans des cas où il sera difficile de
prouver que ce sont en réalité les agents de la police
aux frontières qui n’ont pas été aussi
coopératifs qu’il le faudrait.
L’article
51 de la loi du 26 novembre 2003 est venu apporter des garanties en
matière d’interprétariat, consacrant ainsi un
nouvel article 35 sexies à l’ordonnance du 2 novembre
1945 : obligation de compétence et de secret professionnel,
mise à la disposition de l’étranger de la liste
des interprètes susceptibles d’intervenir, obligation
d’intervention lorsque l’étranger ne parle pas
le français et est analphabète. L’on observera
toutefois que celles-ci sont également fragilisées sur
certains aspects. En particulier, il est désormais possible,
malgré une jurisprudence constante de la Cour de cassation,
de faire intervenir un interprète par l’intermédiaire
de moyens de télécommunication. Même si les nouvelles
dispositions législatives viennent renforcer les garanties
d’impartialité de l’interprète, il n’est
pas certain, et l’expérience l’a suffisamment démontré,
que les étrangers aient une confiance suffisante en une personne
qui n’est pas à leurs côtés et dont le rôle
est pourtant crucial.
Enfin,
toujours par esprit de commodité pour la police et la justice,
indépendamment des intérêts de l’étranger,
une seule langue est utilisée pendant l’ensemble de la
procédure, celle annoncée dès le début
(article 35 sexies, al. 1er).
L’intervention
de l’avocat
Reprenant
des principes dégagés par la Cour de cassation, il est
prévu que les lieux d’hébergement comprennent
“ un espace permettant aux avocats de s’entretenir confidentiellement
avec les étrangers ” et qu’à “ cette
fin, sauf en cas de force majeure, il est accessible en toutes circonstances
sur demande de l’avocat ” (article 35 quater, I, al. 5
in fine). Cette nouvelle disposition doit être lue en combinaison
avec l’arrêt du Conseil d’Etat du 30 juillet 2003
qui souligne la nécessité de bénéficier
des infrastructures matérielles liées à l’exercice
de la mission de l’avocat (téléphone et télécopie).
En pratique, l’on peut déjà craindre qu’avec
la nouvelle définition de la zone d’attente, qui englobe
désormais des lieux figurant à proximité de la
zone aéroportuaire, maritime ou ferroviaire, de même
que tout autre lieu dicté par les nécessités
liées au maintien (notamment hôpital ou juridiction),
ces facilités matérielles fassent défaut, malgré
la volonté du législateur. Enfin, une lecture trop restrictive
de cette nouvelle disposition ne devrait pas autoriser la police aux
frontières à limiter la communication avec l’avocat
seulement dans les lieux d’hébergement. Le concours d’un
avocat constituant un droit fondamental prévu à l’article
35 quater, I, al. 2, celui-ci doit également pouvoir intervenir
lorsque l’étranger maintenu en zone d’attente se
trouve dans un aérogare. Comme pour toute exception à
un droit fondamental, la force majeure pourra enfin être invoquée
seulement dans des cas exceptionnels et circonstanciés.
Délocalisation
et utilisation de moyens de télécommunications
Le
nouvel article 35 quater, III, al. 2, prévoit que “ le
juge des libertés et de la détention statue au siège
du tribunal de grande instance. Toutefois, si une salle d’audience
lui permettant de statuer publiquement a été spécialement
aménagée sur l’emprise ferroviaire, portuaire
ou aéroportuaire, il statue dans cette salle ”
Cette délocalisation des audiences “ 35 quater ”
statuant sur le maintien des étrangers en zone d’attente
et, pour les étrangers maintenus dans la zone de Roissy, habituellement
tenues au Tribunal de Grande Instance de Bobigny a déjà
été envisagée par le gouvernement précédent
et a fait l’objet de nombreuses contestations. Malgré
les avantages liés à la commodité de la gestion
des services de police constamment mis en avant par le ministère
de l’intérieur, cette possibilité, qui ouvre au
juge la possibilité de siéger dans le lieu même
dans lequel la prolongation de la mesure restrictive de liberté
est sollicitée par l’administration, constituerait une
violation des principes essentiels du procès judiciaire et
du principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs qui
implique que le pouvoir judiciaire ne saurait être exercé
dans des locaux appartenant au pouvoir exécutif, la police
en l’occurrence. Elle risque en outre de méconnaître,
à tout le moins d’affaiblir considérablement,
les principes de l’indépendance et de l’impartialité
des juges qui seront isolés de leurs pairs et entourés
de nombreux agents de la police aux frontières, et de la publicité
des débats dans un lieu identifiable comme un lieu dans lequel
la justice est rendue. Au-delà des difficultés d’accès
pour les juges et auxiliaires de justice ainsi que pour tout public,
cette disposition instaure un véritable tribunal d’exception
à l’heure où plus de 12 000 personnes (soit autant
que le contentieux pénal annuel du tribunal de grande instance
de Bobigny) ont été présentées dans le
cadre des maintiens concernant la zone d’attente de Roissy-Charles
de Gaulle.
La loi prévoit également que “ par décision
du juge sur proposition du Préfet, et avec le consentement
de l’étranger, l’audience peut également
se dérouler avec l’utilisation de moyens de télécommunications
garantissant la confidentialité de la transmission ”
(article 35 quater, II, al. 2). Cette possibilité existe également
pour les audiences en appel (article 35 quater II, al. 3).
Là encore, le législateur a manifestement répondu
au souci de commodité, qui prévaut en de nombreux aspects
réformés par la loi du 26 novembre 2003, au mépris
du respect effectif des garanties offertes à l’étranger
maintenu en zone d’attente. L’isolement déjà
existant de l’étranger dont la liberté est restreinte
risque ainsi d’être accentué. L’étranger
ne verra alors même plus son juge, pourtant garant des libertés
individuelles. Le principe fondamental qu’est celui de la publicité
des débats est également atteint sans justification
valable. Enfin, une telle disposition risque également de soulever
des difficultés déontologiques à l’égard
de l’avocat dont l’intervention constitue pourtant un
droit fondamental qui ne doit souffrir d’aucune entorse : celui-ci
sera-t-il aux côtés de l’étranger, du juge
ou dans son cabinet et dans quelles mesures la confidentialité
de son intervention sera-t-elle garantie ? En outre, la nouvelle loi
ne précise pas les modalités selon lesquelles l’étranger
sera informé de la possibilité d’être jugé
par moyens de télécommunications, ni des vérifications
portant sur la réalité de son consentement.
Cette
faculté a été expérimentée pour
la première fois dans l’histoire judiciaire française
en appel d’instances relevant du territoire de Saint Pierre
et Miquelon qui sont à l’évidence d’un nombre
largement inférieur à ceux que connaissent les juges
judiciaires amenés à se prononcer sur certaines zones
d’attente. Pour Saint Pierre et Miquelon, des garanties particulières,
destinées à compenser l’absence de contact immédiat
entre le justiciable et son juge, avaient pu être facilement
respectées en raison du nombre limité des cas concernés.
Appel
suspensif sous condition
“
Si l'ordonnance met fin au maintien en zone d'attente, elle est immédiatement
notifiée au procureur de la République. A moins que
le procureur de la République n'en dispose autrement, l'étranger
est alors maintenu à la disposition de la justice pendant un
délai de quatre heures à compter de l'ordonnance. (…)
Toutefois, le ministère public peut demander au premier président
de la cour d'appel ou à son délégué de
déclarer son recours suspensif. Dans ce cas, l'appel, accompagné
de la demande, est formé dans un délai de quatre heures
à compter de la notification de l’ordonnance au procureur
de la République et transmis au premier président de
la cour d'appel ou à son délégué après
le prononcé de l'ordonnance. Celui-ci décide, sans délai,
s'il y a lieu, au vu des pièces du dossier, de donner à
cet appel un effet suspensif. Il statue par une ordonnance motivée
rendue contradictoirement qui n'est pas susceptible de recours. L'intéressé
est maintenu à la disposition de la justice jusqu'à
ce que cette ordonnance soit rendue et, si elle donne un effet suspensif
à l'appel du ministère public, jusqu'à ce qu'il
soit statué sur le fond ” (article 35 quater, III, al.
2 in fine et 4).
Cette
disposition, également proposée en matière de
rétention administrative, porte clairement atteinte au principe
de l’égalité des parties à l’instance
et introduit ainsi une asymétrie dans notre système
judiciaire. Il est en effet fort à craindre que le prononcé
du caractère suspensif de l’appel dépende, en
ce qui concerne l’étranger, de ses garanties de représentation,
condition qui ne sera à l’évidence pas posée
à l’encontre de l’administration lorsque celle-ci
sera à l’origine de la contestation portée en
appel. Cette asymétrie est renforcée par la mise à
la disposition de l’étranger à la justice pendant
un délai de quatre heures supplémentaires, alors même
que le juge de première instance a décidé qu’il
ne convenait pas de prolonger le maintien en zone d’attente,
ce qui permet au procureur de la République de réagir
avec la plus grande efficacité.
Allongement
de la durée du maintien en zone d’attente en cas de demande
d’asile formulée tardivement
Si
l’accroissement de la durée de la rétention administrative
est l’un des points les plus importants de la réforme,
celle du maintien en zone d’attente a été partiellement
modifiée et vise un seul cas de figure : lorsque l'étranger
non admis à pénétrer sur le territoire français
dépose une demande d'asile dans les quatre derniers jours,
c’est-à-dire entre les seizième et vingtième
jours, le maintien en zone d’attente est prorogé d'office
de quatre jours à compter du jour de la demande par la police
aux frontières. Cette décision est portée sur
le registre prévu à l’article 35 quater, II, et
portée à la connaissance du procureur de la République.
Le juge des libertés et de la détention est informé
immédiatement de cette prorogation et il dispose de la faculté
d’y mettre un terme, soit d’office, soit sur requête
de l’étranger. Mais contrairement à la prolongation
et à la prorogation qui ont été précédemment
décidées respectivement au terme des quatrième
et huitième jours, l’intervention du juge judiciaire
n’est, pour le cas des demandeurs d’asile “ tardifs
”, pas systématique. Il est pourtant le seul garant des
libertés individuelles. Cette nouvelle faculté est enfin
fondée sur la présomption de fraude du demandeur d’asile
qui agirait ainsi de manière dilatoire. Elle est en effet destinée
à éviter qu’un étranger sollicite l’admission
au titre de l’asile quelques jours avant la fin du maintien
en zone d’attente avec l’espoir que l’instruction
de sa demande ne soit pas achevée et qu’à l’expiration
du vingtième jour, il soit automatiquement admis sur le territoire,
muni d’un sauf-conduit. Il n’est toutefois pas rare que
des étrangers rencontrent les pires obstacles pour faire enregistrer
leur demande d’asile par la police aux frontières qui
agit de manière totalement arbitraire. En ont témoigné
de nombreux rapports de l’Anafé.
Une
commission nationale de contrôle
La loi institue une Commission nationale de contrôle des centres
et locaux de rétention et des zones d’attente, chargée
de « veiller au respect des droits des étrangers, (…)
des normes relatives à l’hygiène, à la
salubrité, à la sécurité, à l’équipement
et à l’aménagement des lieux ». Elle effectuera
des missions et pourra émettre des recommandations. Elle sera
comprendra un député, un sénateur, des représentants
de la Cour de Cassation et du Conseil d’Etat, une personnalité
qualifiée en matière pénitancière, deux
représentants d’associations humanitaires et deux des
principales administrations concernées.
Renforcement
des sanctions aux transporteurs
La loi renforce l’arsenal des sanctions contre les transporteurs
d’étrangers arrivant sans les documents requis (amende
de 5000 euros) et incite les compagnies de transports à effectuer
elle-même un contrôle approfondi de leurs passagers puisqu’elles
pourront être dispensées d’amende :
- partiellement (diminution de 2 000 euros), si elles ont mis en place
un dispositif de numérisation et de transmission aux autorités
françaises de documents de voyage ;
- totalement, si elle peuvent établir que « les documents
requis et ne présentant pas d’irrégularité
manifeste leur ont été présentés lors
de l’embarquement » ou si l’étranger a été
admis sur le territoire « au titre de l’asile »
(la loi antérieure prévoyait une dispense si l’étranger
avait demandé l’asile et avait été admis
sur le territoire quel que soit le motif d’admission (asile
ou autre).